La recherche d’océans disparus

La recherche d'océans disparus : ophiolites et sutures continentales

Voyons à partir d’un exemple européen ce qu’on appelle des ophiolites, en quoi elles se trouvent dans des zones de suture continentale et en quoi l’ensemble des ces structures sont des preuves d’océans aujourd’hui disparus.

 

I. Les Alpes : structure, contenu

 

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Cette carte présente les reliefs européens : il y a différentes chaînes de montagnes et en particulier la chaîne alpine qui s’étend de la France à l’ouest vers l’est de l’Europe, notamment l’Italie, la Suisse. Les reliefs alpins montrent qu’il s’agit d’une chaîne de montagnes récente. On appelle cela un orogène et on constate, en observant la hauteur de ces reliefs, qu’ils dépassent à beaucoup d’endroits les 3 000 m. Par ailleurs, la forme de ces reliefs montre qu’ils n’ont pas été très érodés ni émoussés : c’est une chaîne récente.

Les Alpes constituent une chaîne récente et si l’on fait des relevés de roches, on obtient différentes roches à l’affleurement (directement en surface). Dans ces roches, on trouve différentes familles et notamment des roches magmatiques ou métamorphiques qu’on appelle des roches magmatiques cristallines dans le massif du mont Blanc par exemple. Ces roches sont parmi les plus anciennes du massif alpin.

Dans le massif de la Chartreuse, il y aussi des roches sédimentaires plus récentes qui ont quelques dizaines de millions d’années. Enfin, plus surprenant au premier abord, on trouve dans les Alpes des roches d’origine océanique, c’est-à-dire des roches de la croûte ou du manteau. Néanmoins, ces roches ne sont pas dans leur état natif : si on comparait ces roches qu’on considère d’origine océanique à des roches de la lithosphère océanique actuelle, on constaterait que les roches de la lithosphère océanique alpine sont métamorphiques (on dit aussi métamorphisées) c’est-à-dire qu’elles ont subi un certain nombre de transformations. Le métamorphisme est une transformation progressive des roches à l’état solide avec une modification possible de leurs minéraux, une recristallisation. Ce métamorphisme est lié à des modifications de pression le plus souvent et de température subies par les roches au cours de leur histoire.

La présence de roches océaniques dans un domaine continental est appelée ophiolite. Les ophiolites sont toutes les roches d’origine océanique qui ont secondairement été déposées ou transportées en domaine continental et qu’on retrouve parfois lorsque l’océan n’est plus présent. C’est le cas pour les ophiolites alpines.

 

II. Les ophiolites du massif du Chenaillet

 

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Voici un panorama du massif du Chenaillet, très étudié par les géologues. En progressant vers le sommet du massif, on peut différencier trois zones qui ont des contenus géologiques légèrement différents.

 

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Dans la zone 1, la plus basse en altitude, on trouve des roches de nature péridotidique, issues du manteau. Zone 2, on trouve des gabbros, roches de la croûte océanique qui se forment en profondeur juste au-dessus de la péridotite. Enfin, zone 3, on trouve du basalte lui aussi issu de la croûte océanique, qui a la particularité d’être organisé comme en coussin.

 

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Ces coussins de basalte qu’on appelle aussi pillow lava sont formés au niveau des dorsales océaniques lorsque du magma sort de la chambre magmatique et qu’au contact de l’eau,  au fond de l’océan, il refroidit de façon assez rapide : il se fige en coussin basaltique.

Si on analyse la structure de l’ophiolite du Chenaillet (basaltes avec en-dessous des gabbros et encore en dessous de la péridotite), c’est presque une lithosphère océanique telle quelle. Sauf que ce fragment de lithosphère océanique se trouve au milieu des Alpes. Le basalte, le gabbro et la péridotite du Chenaillet sont donc la preuve d’un paléo-océan qui a existé dans les Alpes il y a plusieurs centaines de millions d’années. Ce paléo-océan a aujourd’hui disparu par subduction.

 

III. La suture continentale alpine

 

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Sur cette carte géologique des reliefs on s’aperçoit que les Alpes sont finalement la suture (comme la cicatrice) qui prouve la disparition de ce paléo-océan. Les Alpes viennent montrer la limite entre les deux anciens blocs continentaux aujourd’hui réunis. La paléo-subduction a amené progressivement à la disparition par fermeture de l’océan alpin.

Il faut noter qu’en réalité la situation était un peu plus complexe que celle présentée en classe : il n’y avait pas un seul océan alpin mais deux : l’océan alpin et l’océan valaisan qui se trouvait à proximité. Néanmoins, ces deux océans se sont progressivement fermés : cela a amené à une collision continentale démarrée il y a environ 35 millions d’années, accompagnée d’une orogenèse, c’est-à-dire la mise en place de reliefs. L’orogenèse alpine démarrée il y a quelques dizaines de millions d’années, se poursuit encore : il y a toujours une augmentation des reliefs. Ces reliefs alpins, du fait justement de leur hauteur, sont également soumis à l’érosion. On n’observe pas d’augmentation rapide du relief alpin. L’érosion est mise en place à partir du moment où il y a relief. En effet, toute roche soumise aux aléas climatiques, notamment le vent, les variations de températures, l’humidité, etc., a tendance à s’éroder, c’est-à-dire à s’user.

 

Conclusion

 

La présence d’ophiolites, dans le massif alpin mais également à d’autres endroits du monde, est la preuve de l’existence de paléo-océans. On est bien dans la découverte d’océans aujourd’hui disparus, et ces ophiolites se trouvent toujours à la suture, c’est-à-dire au point de fusion des lithosphères continentales qui sont entrées en collision suite à la disparition des lithosphères océaniques par subduction.

Disparition des océans : subductions et obductions

L’objectif de ce cours est de définir ces deux termes : subduction et obduction et de voir qu’ils concourent tous deux à la formation des ophiolites, qui sont des portions de lithosphère océanique de différentes tailles possibles, que l’on retrouve actuellement sur des domaines continentaux. Dans une zone de subduction, de la lithosphère océanique âgée est plus dense que l’asthénosphère sous-jacente et va donc plonger et s’enfoncer dans cette asthénosphère. Cela se fait souvent au contact d’une autre lithosphère océanique, ou bien, plus souvent, d’une lithosphère continentale.

 

I. Ophiolites naissant à partir d’une subduction

 

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Sur ce schéma est représentée une étape de la subduction alpine qui s’est déroulée entre -80 et -35 millions d’années environ. Au cours d’une subduction, différentes roches métamorphiques vont se former dans la lithosphère océanique.

Une lithosphère océanique avant subduction (1) est formée notamment de schistes verts, qui sont des gabbros et basaltes métamorphisés dans lesquels sont apparus de nouveaux minéraux : des amphiboles vertes (par exemple de la hornblende) mais également des minéraux comme la chlorite ou l’actinote. Ces minéraux sont des minéraux hydratés qui résultent de l’hydrothermalisme, c’est-à-dire du métamorphisme hydrothermal que subit la lithosphère océanique au fond de l’océan.

Au cours de la subduction vont se former ensuite des roches témoins du métamorphisme de subduction. En premier, des roches qu’on appelle des schistes bleus qui peuvent se former par transformation des schistes verts. Ces schistes bleus vont contenir un nouveau minéral hydraté, la glaucophane. Dans un deuxième temps, si la subduction se poursuit et que la lithosphère océanique atteint des profondeurs assez importantes, au-delà de 15/20 km, peut se former une dernière roche, l’éclogite. C’est une roche déshydratée qui a perdu son eau, où l’on trouve encore de nouveaux minéraux (la jadéite et le grenat).

 

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On trouve de ces trois types de roches métamorphiques témoins d’une subduction dans les Alpes. Pour les schistes verts, au Chenaillet ; pour les schistes bleus au niveau du massif du Queyras ; et des éclogites au Mont Viso, en Italie proche de la frontière française.

La disposition de ces trois types de roches sur une carte montre que les roches les moins métamorphisées se trouvent à l’Ouest et les roches les plus métamorphisées se trouvent à l’Est. On interprète cela par le fait que la subduction de l’océan Alpin s’est faite d’Ouest en Est avec les régions les moins métamorphisées, donc témoin d’un plongement moins profond qui se trouverait à l’Ouest, et les roches contenant les ophiolites, les plus métamorphisées, à l’Est.

Ces ophiolites, aujourd’hui dans un domaine entièrement continental, sont les témoins d’une paléo-subduction mais aussi d’une exhumation. Cette exhumation a eu lieu il y a environ 30 millions d’années, et les ophiolites actuelles qu’on peut observer dans les Alpes, témoignent donc de la subduction de l’océan Alpin et de sa disparition progressive achevée il y a quelque dizaines de millions d’années.

 

II. Ophiolites naissant à partir d’une obduction

 

L’obduction est le charriage, c’est-à-dire le déplacement de portions de lithosphère océanique de grande taille, sur le domaine continental. C’est ce qui s’est passé pour donner naissance aux ophiolites d’Oman.

 

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Oman se trouve au niveau de la péninsule arabique, séparé de l’Iran par la mer d’Arabie. On a représenté deux étapes : il y a 85 millions d’années environ, subduction d’une portion de lithosphère océanique sous une autre portion de lithosphère océanique (plaque du dessus), et au cours de ces millions d’années qui nous séparent de cette première étape, il y a eu chevauchement par la lithosphère océanique du bloc continental qui correspond aujourd’hui à Oman.

Ce bloc de lithosphère océanique est donc venu se déposer en partie à cause des forces de compression qui rapprochaient Oman de l’Iran et fermaient progressivement l’océan qui se trouvait là. Ce chevauchement est venu déposer un fragment de lithosphère océanique sur la lithosphère continentale. Il faut imaginer qu’à ce moment, les deux fragments représentés étaient liés l’un à l’autre, il y avait un seul et même morceau de lithosphère océanique.

Dans un deuxième temps et très progressivement, l’érosion a fait son jeu et a isolé ce fragment de lithosphère océanique qui est l’ophiolite d’Oman du reste de la lithosphère océanique observable actuellement. À noter, le golfe d’Oman est occupé par la mer, donc la subduction n’est pas achevée comme c’est le cas dans les Alpes. On peut supposer que dans les millions d’années à venir, il pourrait y avoir la poursuite de cette subduction et la fermeture complète de cet océan et éventuellement la collision des deux blocs continentaux constitués par Oman et par l’Iran. Éventuellement ces lithosphères océaniques en subduction pourraient alors donner naissance à de nouvelles ophiolites qui ressembleraient de par leur mécanisme de formation aux ophiolites alpines.

 

Conclusion

 

La disparition des océans se fait par subduction, il y a plongement de la lithosphère océanique dans l’asthénosphère et certains fragments de cette lithosphère peuvent être préservés et se retrouvent en surface, formant des ophiolites. Ces ophiolites trouvées en domaine continental sont la preuve d’un paléo-océan mais aussi de sa disparition par subduction. Il faut avoir compris la différence du mode de formation de ces deux types d’ophiolite : une subduction quasi complète et une exhumation qui va donner naissance aux ophiolites qu’on trouve dans les Alpes ; ou bien le charriage de panneaux de lithosphère océanique au-dessus de la lithosphère continentale qui donne naissance à des ophiolites d’obduction comme l’ophiolite d’Oman.

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