L’art de la parole à l’Antiquité

L'art de la parole à l'Antiquité

À cette époque, l’Art de bien parler est aussi appelé la rhétorique. La rhétorique se décline de façons différentes en fonction des auteurs.

 

I. Les sophistes

 

Dans la Grèce antique, on compte les sophistes parmi les auteurs les plus importants pour la rhétorique. Un certain nombre de noms de sophistes nous sont parvenus. Parmi eux, l’auteur le plus important est sans doute Gorgias, dont les textes ont été retranscrits par Sextus Empiricus. Ce dernier a compilé les témoignages de beaucoup d’auteurs, dont de nombreux sophistes, en regroupant des fragments de textes lacunaires. Gorgias a fait de la philosophie mais il a également écrit des discours prononcés dans des cadres officiels, qui sont autant de morceaux d’éloquence.

 

Qu’est-ce qu’un sophiste ?

Les sophistes sont des « spécialistes de la sagesse » (sophos en grec ancien) et s’opposent aux philosophes, car les philosophes sont ceux qui aiment la sagesse (de philein, aimer, et sophia, la sagesse). Les philosophes considèrent que la sagesse est trop difficile à atteindre pour pouvoir prétendre en être spécialiste. Par conséquent, ils méprisent les sophistes.

Ces sophistes veulent former des élèves à la réflexion et à la prise de parole. Ils se positionnent en maîtres, en professeurs et veulent transmettre ce qu’ils considèrent être une technique plutôt qu’un art. Ils enseignent la délibération (manière de peser le pour et le contre pour prendre une décision), la réflexion mais également la prise de parole (comment rendre un discours attrayant dans le but de convaincre ou de persuader les auditeurs). Ce sont donc des personnes qui travaillent véritablement la rhétorique. Le terme de « rhétorique » et la discipline associée existent d’ailleurs déjà à l’époque.

Gorgias est un personnage important car il apparaît par ailleurs dans un dialogue de Platon, intitulé Le Gorgias. Platon, plutôt hostile aux sophistes, tâche de désarçonner ou de critiquer Gorgias par le biais du personnage de Socrate, qui était son professeur.

Cette opposition entre sophistes et philosophes peut-être un biais permettant d’interroger ce qu’est l’Art de la parole.

 

II. Les auteurs de théâtre

 

Un auteur célèbre de la Grèce antique est Euripide. Il a écrit la tragédie Médée qui relate la séparation violente des époux Médée et Jason. Ils se disputent alors la « garde » de leurs enfants (le terme est anachronique mais traduit l’idée générale). Dans cette pièce, il y a plusieurs passages où les personnages défendent leurs points de vue qui constituent des morceaux d’éloquence, que ce soit dans les discours de Médée ou de Jason.

Par exemple, lors du passage où Jason essaie de convaincre Médée de lui laisser leurs enfants et de justifier le fait qu’il choisisse de la quitter pour une autre femme, en expliquant que cette dernière, par le mariage, lui permettrait d’acquérir un royaume. Lors d’un autre passage, Médée se défend et déplore la condition féminine. Elle fait alors un parallèle entre une femme qui doit suivre son mari et accepter sa décision de la répudier et la condition des étrangers voués à l’exil. En effet, à l’époque on ne peut entrer dans un autre royaume que le sien. Une condamnation à l’exil équivaut donc à une condamnation à l’errance perpétuelle. Jason et Médée se trouvent alors dans cette situation.

Il s’agit donc de morceaux d’éloquence importants dans un cadre littéraire, ce qui permet de croiser rhétorique et littérature.

 

III. Autres exemples

 

Platon, Le Phèdre

Il s’agit d’un dialogue dont la première partie porte sur l’amour et la seconde sur la rhétorique. Socrate s’y interroge avec le personnage dénommé Phèdre sur ce que veut dire bien parler. Il en donne plusieurs définitions, dont la suivante : « bien parler c’est savoir ce dont on parle ». Il considère en effet qu’il est impossible de parler « dans le vide » et il s’agit d’ailleurs ici d’une attaque contre les sophistes qui prétendent pouvoir bien parler de tout, même des sujets qu’ils ne maîtrisent pas du tout.

 

Aristote, Rhétorique

Aristote, philosophe de l’Antiquité grecque également, intitule un de ses ouvrages Rhétorique. Il y distingue des genres de l’argumentation qui se sont transmis jusqu’à l’époque contemporaine :

– Le genre judiciaire : la défense ou l’accusation d’une personne.

– Le genre épidictique : le blâme ou l’éloge d’une personne.

– Le genre délibératif : peser le pour et le contre avant de prendre une décision.

Ce sont trois manières d’organiser, de penser un texte d’argumentation et ce sont des termes qui sont encore utilisés aujourd’hui en analyse stylistique de l’argumentation.

 

Cicéron, De l’invention

Il s’agit d’un homme politique de l’Antiquité romaine. Cicéron a écrit un texte, De inventionae en latin, ou De l’invention en français. C’est un des premiers livres latins sur la rhétorique et Cicéron pratiquait également lui-même la rhétorique dans ses discours. Dans ce texte, il distingue cinq parties dans la composition d’un discours oratoire :

– L’invention (inventio) : le fait d’avoir les idées.

– La disposition (dispositio) : agencer les idées, les organiser.

– L’élocution (elocutio) : contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce n’est pas le moment de parler mais le moment de travailler le style du discours.

– La mémoire (memoria) : le fait de mémoriser le texte.

– L’action (actio) : dire le texte, le performer, idéalement sans support écrit.

Selon Cicéron, ce sont donc les étapes de travail d’un discours qui traversèrent également les siècles. En effet, il s’agit de distinctions encore utilisées aujourd’hui.

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