Première > Géopolitique et sciences politiques > Sujets contrôle continu > Avancées et reculs de la démocratie dans le monde
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Le cas de l’Espagne est différent de celui du Chili. Ce n’est pas un coup d’Etat militaire, contre-révolutionnaire, militaire et conservateur, mais bien un processus de transition démocratique depuis la dictature du général et président Franco afin de mettre en place un cadre de monarchie parlementaire constitutionnelle. Un processus encadré, prévu de longue date, qui fait l’originalité de l’Espagne des années 1970.
Pour comprendre l’originalité historique de l’Espagne, il faut prendre en compte le fait que la démocratie a été octroyée. L'ancien caudillo (chef de guerre) Franco avait préparé sa succession et l'évolution avec le retour de la monarchie vers la démocratie. Le président Franco meurt le 20 novembre 1975 et deux jours plus tard, le 22 novembre, le jeune roi Juan Carlos, est couronné et assume, par son charisme personnel, son adhésion au projet franquiste d’une transition vers une monarchie démocratique.
L’idée directrice est d’éviter une rupture complète avec l’héritage franquiste. En effet, il s’agit de maintenir une partie des cadres franquistes dans les rouages de l’État et de sauvegarder la puissance de l’armée et de l’Église. En cela, le roi Juan Carlos a très bien mené ce processus. Il a pu faire accepter, dans le cadre d’une Espagne en voie de démocratisation, le fait que l’on change de gouvernement avec la nomination d’un nouveau premier ministre issu du personnel franquiste. Ce dernier était modéré et a accepté le fait qu’il fallait changer le système. Il s’agit d’Adolfo Suárez.
Dans le cadre de ce gouvernement de transition, il a pris des décisions historiques, notamment le fait de faire revenir le parti communiste dans le jeu politique et de remettre en place les libertés individuelles et politiques fondamentales. Il a levé la censure sur la presse est a même engagé un mouvement de négociation avec les syndicats qui étaient vus comme un rouage important de la démocratie. En 1977, les syndicats ont accepté de signer le pacte de la Moncloa par lequel ils acceptaient de collaborer avec le gouvernement et avec le patronat. Ils ont accepté de ne pas avoir de revendications sociales trop fortes pour accompagner le processus de démocratisation.
Le point d’orgue de cette transition progressive est la rédaction d’une nouvelle constitution adoptée par référendum en 1978. C’est une constitution démocratique libérale qui assure la séparation des pouvoirs dans le cadre d’une monarchie constitutionnelle. Cette constitution prévoit aussi pour les différentes régions d’Espagne un statut d’autogouvernement à mi-chemin entre le fédéralisme et les états centralisés à la française. La jeune démocratie espagnole a été consolidée à la fin des années 1970 et au début des années 1980 par le retour d'un système de multipartisme.
Au cœur de ceci, au démarrage on trouve le parti de centre-droit, créé par Adolfo Suárez, qui avait pour objectif de recycler les anciens franquistes qui adhéraient désormais à la démocratie. Face à cette Union démocratique du centre, des partis de gauche comme le parti communiste et le parti socialiste espagnol se sont neutralisés. Après le départ d’Adolfo Suárez, l’UDC a perdu de l’influence et aux élections législatives de 1982, il y a eu la grande alternance politique qui montre que désormais les héritiers du franquisme sont dépositaires de cette transition réussie vers la démocratie et qu’ils pouvaient perdre des élections. Le parti socialiste ouvrier espagnol l’a emporté et l’opposition s’est reconfigurée autour de l’Alliance Populaire en 1982.
Désormais ce sont les socialistes, dirigés par Felipe Gonzalez, qui occupent le devant de la scène et forment le parti dominant dans les années 1980. Ces années sont cruciales pour la consolidation de la démocratie. Les élections de 1982 étaient une rupture, elles ont montré que les Espagnols étaient engagés auprès de leur jeune démocratie représentative. Il faut savoir que le taux d’abstention a été extrêmement faible : un tiers du corps électoral. De la même manière, dans les différentes régions espagnoles, les partis autonomiste ou indépendantistes ont vu leur essor limité en comptabilisant seulement 8 % des voix. Dans les régions les plus travaillées par ces velléités d’éloignement du pouvoir de Madrid comme en Catalogne et au Pays Basque, les autonomistes ont fait entre un tiers et la moitié des voix. Cela montre une adhésion large à la jeune démocratie espagnole. Cette consolidation n’empêche pas des menaces de planer sur la démocratie espagnole.
La première menace qui pèse sur la démocratie espagnole vient de l’armée. En effet, l’armée continue, dans ces années, à bruisser des complots antidémocratiques et de lutter de façon interne, bien que huit généraux aient été assassinés entre 1978 et 1982.
Le 23 février 1981, la crise « 23-F » a lieu au congrès des députés du peuple avec une tentative de coup d’État des généraux menée par le lieutenant-colonel Tejero. Le congrès des députés est pris d'assaut et l’armée tire à balles réelles. C’est le roi Juan Carlos qui s’est opposé personnellement à cette prise de pouvoir par l’armée et qui a permis de sauver les institutions démocratiques.
La deuxième menace majeure est le terrorisme. Le terrorisme basque est très actif depuis 1976 et menace gravement les nouvelles institutions. Pourquoi ? Au moins trois raisons :
- La menace terroriste justifie le maintien d’un pouvoir fort de l’armée et des contestations internes à l’armée apparaissent au sein du jeune régime politique.
- Ce terrorisme risque de mettre en péril l’édifice d’autogouvernement donné aux différentes régions alors même que le Pays Basque voit les voix entre indépendantistes et nationalistes s’équilibrer.
- Il n’existe de sortie possible de la crise basque uniquement que par le dépérissement de ses organisations terroristes. C’est donc à cette époque un conflit qui est appelé à durer et à s’inscrire dans le temps.
La troisième menace vient paradoxalement de l’Europe. Depuis 1962, l'Espagne à l’époque de Franco a officiellement déposé sa candidature à l’entrée dans la communauté européenne. Ce qui a été refusé par les partenaires européens et notamment par la France en raison de la dictature militaire.
Après la chute de Franco et au moment des réformes démocratiques, l’Espagne a de nouveau déposé sa candidature et la France s’est opposée à partir de 1977 pour les mêmes raisons du fait de l’héritage du franquisme et parce que cela représentait un défi économique et politique. Finalement l’entrée dans la CEE a été acquise au milieu des années 1980 et cela a été l’une des grandes actions menées par le gouvernement socialiste de Felipe Gonzales. A partir de 1986, l'Europe est aussi une bouée de sauvetage pour la société espagnole qui vit très durement la crise de l’époque.
Pour conclure, on peut considérer en cette année 1986 que la transition démocratique espagnole est achevée. En effet, le 1er janvier 1986, l’Espagne entre dans l’Europe démocratique, libérale et dans le grand marché en constitution. En cette même année, les élections législatives confirment le pouvoir à Felipe Gonzales est au PSOE. Or, il existe la domination d’un parti hégémonique, le parti socialiste ouvrier espagnol dans la démocratie espagnole et c’est aussi une forme de la démocratie représentative.
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