Voter : une affaire individuelle ou collective ?

Comment expliquer la volatilité électorale ?

Un des faits marquants concernant la pratique politique conventionnelle de ces dernières décennies est la montée de la volatilité électorale. Elle rend plus complexe le fait d’anticiper la victoire de tel ou tel candidat ou de partis à différents scrutins. Par ailleurs, la volatilité électorale témoigne du changement de l’offre politique, voire du système politique dans son ensemble dans la démocratie représentative.

 

I. Un phénomène revêtant différentes formes

 

A. Le cas de l’intermittence du vote

On voit statistiquement que selon les scrutins, il y a des électeurs qui se rendent à certains scrutins mais pas à d’autres. Si l’intermittence du vote est un acte individuel, on peut le voir de manière collective grâce à des agrégats statistiques, notamment le taux d’abstention. On voit que ce taux varie en fonction des différents scrutins.

 

B. Le changement de préférences électorales

La seconde forme de volatilité électorale est le changement des préférences électorales. Ce changement de préférence électorale est interne à un camp. Si on est à gauche, on se déplace à l’extrême gauche ou au centre, et si on est à droite, on se déplace vers le centre ou vers l’extrême droite.

Concernant les mobilités dites transgressives (par exemple pour un électeur passer de gauche à droite ou de droite à gauche), c’est un fait qui peut avoir lieu mais il est relativement marginal.

 

II. Les principaux facteurs explicatifs

 

A. Le contexte du scrutin

En fonction de l’importance du scrutin, certains électeurs sont amenés à voter pour des scrutins jugés importants et s’abstiennent pour d’autres scrutins. Par exemple pour le premier tour de l’élection présidentielle en 2017, le taux de participation était de 78 %. Mais quelques semaines après, pour le premier tour des élections législatives (où on élisait les députés), ce taux n’était que de 51 %. L’écart entre les deux scrutins était de 27 points, ce qui est considérable.

A cet égard, les élections européennes sont les plus boudées par les électeurs français, peut-être parce qu’il considèrent que c’est un scrutin moins important alors que c’est un scrutin qui est extrêmement important puisque le droit européen a un effet sur le droit français.

 

B. L’affaiblissement du clivage gauche-droite

Ce clivage était clairement identifié et il tend à se brouiller, notamment parce qu’une partie de la gauche s’est ralliée à l’économie de marché. A droite, on remarque un rapprochement idéologique sur des sujets sociétaux, ce qui tend à brouiller ce clivage entre la gauche et la droite.

Par ailleurs, l’identification partisane est moins évidente. Il y a différents cas de figure :

– on peut être libéral sur le plan économique mais être humaniste sur le plan des valeurs sociétales ;

– on peut être assez interventionniste d’un point de vue économique mais être aussi autoritaire voire xénophobe.

De fait, on observe une convergence des idées et des valeurs à partir de la seconde moitié du XXe siècle. L’exode rural mais également l’affaiblissement de la classe ouvrière, l’émergence d’une vaste classe moyenne diplômée ont permis une convergence des valeurs de la plupart des Français, ce qui tend à affaiblir ce clivage et à davantage se rapprocher vers le centre.

 

C. Des facteurs d’ordres sociologiques

Les idées changent, mais aussi les partis et les candidats. Face à un jeu politique changeant, il faut pouvoir analyser et décrypter cela.

Or, il est montré que les citoyens les moins diplômés, les moins intégrés à la société, ont davantage de mal à décrypter ces changements d’idées ou d’orientations politiques. Ces individus ont une propension beaucoup plus fort à la volatilité électorale.

Le vote : un acte individuel ou collectif ?

Se demander si le vote résulte d’un acte individuel ou collectif invite à évoquer les principales théories du comportement électoral. On peut dire que l’acte de voter résulte d’un acte et d’un comportement individuel. Dans ce cas-là, on se focalise sur la rationalité de l’électeur.

 

I. Un électeur rationnel

 

Il agit selon son libre arbitre et s’émancipe de variables sociologiques plus structurantes. Il émet une analyse coûts/avantages dans la mesure où il choisit le candidat ou le parti qui maximise son utilité.

Dans cette perspective, on peut aussi parler du vote sur enjeu. Il s’agit de l’idée selon laquelle l’électeur moins dépendant d’un vote de classe est amené à être attentif à l’offre électorale du moment. Dans ce cas, l’électeur agit de façon pragmatique pour satisfaire ses intérêts. Telle ou telle mesure est retenue par un candidat donc l’électeur en est affecté. Par exemple, une réforme climatique ou la baisse des impôts peut expliquer pourquoi un électeur vote ou non pour un candidat.

Cette analyse assez individualiste selon laquelle l’électeur est rationnel, tend à jeter de l’ombre sur des variables plus sociologiques, plus structurantes.

 

II. Les variables lourdes du vote

 

La seconde façon d’expliquer le vote porte sur une dimension collective : le vote témoigne d’une appartenance sociale. On parle de variables lourdes du comportement électoral. Il a deux théories principales.

 

A. Facteurs sociologiques (modèle de Columbia)

Avec le modèle de Columbia, il s’agit d’expliquer pourquoi électeurs américains vote pour le Parti démocrate, progressiste, ou pour le parti conservateur, le Parti républicain. Dans le modèle de Colombia, on retient trois facteurs d’ordre sociologique :

– le lieu de résidence de l’électeur, soit en campagne ou dans des grandes villes, c’est le clivage urbain/rural,

– la religion, catholique ou protestante,

– le milieu de vie de l’électeur, soit modeste soit favorisé.

Les électeurs davantage modestes plutôt protestants et qui habitent dans les grandes villes ont une propension beaucoup plus forte à voter pour les candidats démocrates.

 

B. Identification partisane (modèle de Michigan)

Le second modèle américain, le modèle de Michigan, prolonge le premier. Il parle de la question de l’identification partisane. Durant la socialisation primaire, un individu s’identifie très tôt à tel ou tel parti, démocrate ou républicain. Avec la famille, avec les groupes de pairs, l’identification partisane se cristallise et perdure tout au long de la vie.

Ces deux modèles sont intéressants dans la mesure où ils pensent que c’est le milieu social d’appartenance de l’individu qui influence le vote pour tel ou tel candidat.

 

C. Transposition

On peut le transposer au cas français, en retenant bien sûr le lieu de résidence, la pratique religieuse, mais également la profession ou la catégorie socioprofessionnelle. A cet égard des chercheurs français ont analysé différents scrutins, notamment des scrutins présidentiels.

Le second tour des élections présidentielles en 2007 opposait Ségolène Royal, candidate socialiste, et Nicolas Sarkozy, candidat de la droite. Si on était chômeur ou si on habitait dans les grandes villes, l’électeur avait plus tendance à voter pour la candidate de la gauche alors que pour les indépendants ou pour les personnes qui avaient une pratique religieuse, notamment les catholiques, il y avait une propension beaucoup plus forte à voter pour le candidat de la droite.

Taux d'inscription, taux de participation, taux d'abstention

Ces trois indicateurs concernent les scrutins électoraux. Le jour du scrutin, les médias renseignent souvent sur le taux de participation et le taux d’abstention. Ce sont des indicateurs importants pour comprendre le fonctionnement des démocraties représentatives.

 

I. Le taux d’inscription

 

Le taux d’inscription mesure le rapport entre le nombre de personnes inscrites sur les listes électorales et la population française en âge de voter.

Les conditions pour faire partie des listes électorales est d’être majeur, avoir la nationalité française et être inscrit sur liste électorale. Aujourd’hui, lorsqu’on a 18 ans, on est automatiquement inscrit sur les listes électorales.

En 2018, l’Insee renseigne que le taux d’inscription est de 88 % par rapport à la population française en âge de voter. Ce sont souvent les trentenaires qui sont les moins fréquemment inscrits sur les listes. Par ailleurs, quel que soit l’âge, les personnes vivant dans l’ouest de la France sont plus fréquemment inscrites. Les personnes moins diplômées sont moins fréquemment inscrites sur les listes électorales.

 

II. Le taux de participation

 

Le taux de participation est le nombre de votants lors d’un scrutin par rapport au nombre de personnes inscrites sur les listes électorales.

Les conditions sont de se rendre aux urnes, avoir une pièce d’identité et sa carte électorale, signer lorsque l’on vote. On peut également déléguer cet acte à une tierce personne, il s’agit de la procuration. Cet acte en France reste relativement encadré.

Le taux de participation durant le premier tour de l’élection présidentielle en 2007 était de 78 %

 

III. Le taux d’abstention

 

Le taux d’abstention exprime lors d’un scrutin le nombre de non-votants par rapport au nombre de personnes inscrites sur les listes électorales.

C’est l’inverse du taux de participation. Si le taux de participation pour le premier tour des élection présidentielles en 2007 était de 78 %, alors le taux d’abstention était de 100 – 78 = 22 %.

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