Tensions, mutations et crispations de la société d’ordre

Tensions, mutations et crispations de la société d'ordre au XVIIIe siècle

I. Une société inégalitaire

 

A. Une société d’ordres (trois ordres)

– Le tiers état représente 95 % de la population, c’est un ordre très varié. La majorité sont des paysans mais il y a aussi dans ce tiers état, des bourgeois, des habitants des villes. Le tiers état regroupe tous ceux qui ne font pas partie des deux ordres privilégiés (la noblesse et le clergé). Le tiers état paie l’ensemble des impôts du royaume alors que le clergé et la noblesse sont exempts de nombreux impôts.

– Le clergé a un principal rôle religieux mais son influence est très importante. Il a un pouvoir économique très important : c’est un grand propriétaire terrien (les abbayes qui ont de grands domaines agricoles) et il joue un rôle dans l’enseignement et dans l’assistance des plus pauvres mais aussi des malades.

– La noblesse a un rôle particulier. Traditionnellement, c’est elle qui a pour mission de défendre le royaume. Elle est effectivement présente à l’intérieur de l’armée, dans les plus hautes charges, mais c’est elle aussi qui est recrutée pour occuper les plus hautes charges du monde ecclésiastique. On la retrouve également dans le domaine juridique : c’est elle qui a les plus grandes charges juridiques. 

 

B. Des tensions régulières

Cette société d’ordres et surtout son injustice fiscale provoquent de nombreuses tensions. Durant tout le XVIIIe siècle, on observe de nombreux épisodes de tensions, de révoltes comme celle de la révolte des Nu-pieds en 1639. Ces révoltes n’ont pas pour objectif de remettre en cause l’ordre établi ; à aucun moment il n’est question de faire tomber le roi. Ces révoltes ont lieu suite à des rumeurs d’un nouvel impôt ou d’une nouvelle taxe et déclenchent les foudres des paysans. Ces paysans sont souvent accompagnés par des membres du clergé ou des membres de la petite noblesse, qui les poussent à se révolter.

Dans les villes, il existe aussi des tensions, mais les révoltes sont beaucoup moins fréquentes et surtout moins intenses. Elles s’expliquent aussi par des tensions liées à de nouveaux impôts ou par le coût de la vie. Souvent, elles tirent pour origine les révoltes qui démarrent dans la campagnes.

Cette société n’est pas complètement figée. Il existe, d’une manière limitée, une possibilité d’ascension sociale surtout au niveau de la bourgeoisie. Les bourgeois peuvent acheter des charges anoblissantes qui permettent d’exercer une fonction dans le domaine de la justice et d’accéder à la noblesse de robe.

Cette noblesse de robe est en concurrence avec la noblesse traditionnelle, la noblesse d’épée, mais de nombreux mariages sont effectués entre les deux noblesses, ce qui permet dans une certaine mesure aux bourgeois les plus riches d’intégrer les plus hautes sphères de la société et d’intégrer les ordres privilégiés.

 

II. Les mutations de la société

 

A. Les progrès dans les campagnes

La société du XVIIIe siècle n’est pas figée et connaît de nombreuses mutations. La vie dans les campagnes reste difficile : le travail agricole demande une main-d’œuvre nombreuse et il est très harassant.

Cependant, on voit une augmentation de la production agricole durant tout le XVIIIe siècle. Cela se manifeste par la disparition des grandes famines : la dernière que connaît le Royaume de France est celle provoquée durant l’hiver 1709-1710. Durant tout le XVIIIe siècle, on constate une amélioration de la condition des paysans et de la production agricole. Cela est dû à des innovations mais aussi à la mise en culture de nouvelles espèces telles que la pomme de terre ou le maïs. Néanmoins, ce progrès dans les campagnes ne profite pas à tous les paysans. Ceux qui en profitent le plus sont les laboureurs : les paysans les plus riches qui disposent d’un attelage et qui accumulent l’essentiel de ces nouvelles richesses.

 

B. Les mutations urbaines

Les mutations touchent aussi les villes : on parle de mutation urbaine. Il y en a des villes portuaires qui s’enrichissent grâce au commerce colonial : le commerce triangulaire. D’autres nombreuses villes s’enrichissent aussi avec le développement d’activités manufacturières telles que le travail du textile, qui devient de plus en plus important et permet de dégager des bénéfices de plus en plus grands.

Ces mutations urbaines ont une conséquence sociale qui est l’avènement et l’affirmation d’une nouvelle classe : les bourgeois. Ceux-ci ont pour objectif d’accéder à la noblesse et pour cela elle lui emprunte ses codes culturels. Dans les villes, on voit l’émergence d’une nouvelle culture qui se manifeste notamment dans les salons mondains, souvent dirigés par des femmes de la haute noblesse ou de la bourgeoisie. On  discute littérature et on parle aussi des idées des Lumières qui se développent au XVIIIe siècle.

Toutefois, comme dans les campagnes, il ne faut pas embellir la situation des villes. La pauvreté est très importante et les pouvoirs publics, durant tout le XVIIIe siècle, ont tendance à enfermer de plus en plus les pauvres dans des hôpitaux généraux afin de se débarrasser de leur présence dans l’espace public.

 

III. La société française à la fin du XVIIIe siècle

 

A. La réaction seigneuriale

La société française va connaître à la fin du XVIIIe siècle des profondes crispations. Cela passe tout d’abord par la réaction seigneuriale. C’est une volonté de la part des seigneurs de remettre à nouveau des taxes ou des impôts qui avaient disparu. C’est aussi une volonté de s’approprier des communaux, c’est-à-dire des terres qui appartenaient à l’ensemble de la communauté villageoise.

Elle s’explique tout simplement par la baisse des revenus fonciers. Cette réaction seigneuriale a des conséquences et a tendance à augmenter les tensions et les révoltes au sein des campagnes. 

 

B. La réaction aristocratique

À la fin du XVIIIe siècle, on trouve une réaction aristocratique. L’édit de Ségur en 1781 a pour objectif d’interdire à la noblesse de robe d’accéder aux grandes fonctions de l’armée qui sont donc réservées à la seule noblesse d’épée. La noblesse de robe cherche aussi à se protéger puisqu’elle va interdire la vente d’offices anoblissants aux roturiers. Ainsi, la faible possibilité d’ascension sociale est quasiment réduite à néant.

 

C. L’impasse financière

Le royaume de France, à la fin du XVIIIe siècle, connaît une grave crise économique et financière. En effet, les caisses de l’État sont vides. Les nombreuses guerres, les dépenses de la cour ont appauvri le royaume. À cela s’ajoute le fait que le tiers état supporte de moins en moins les privilèges fiscaux de la noblesse et du clergé. Le roi essaie de réformer le système fiscal mais les ordres privilégiés continuent de s’opposer à toutes les réformes proposées. À cela s’ajoute une crise frumentaire qui touche les récoltes en 1787 et 1788. Le roi est confronté à une impasse. Il décide de convoquer les états généraux, une assemblée des trois ordres qui a pour objectif d’apporter une solution à cette crise importante.

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