Océans et espaces, les dernières frontières

Océans et espaces, les dernières frontières

La frontière est comprise comme une zone d’expansion ou de conquête. Étudier les frontières, c’est d’abord s’intéresser aux océans et mers, définis comme des étendues d’eau salée en communication libre, naturelle, qui couvrent environ 70 % de la surface terrestre et mettent en contact les 8/10e des États les uns avec les autres. Depuis les années 1980-1990, ces espaces maritimes sont devenus des objets d’appropriation par les États, qui les découpent en zones de souveraineté réservées.

Parallèlement, il faut aussi évoquer l’espace, qui désigne ce qui est compris à une altitude supérieure à 50 km. Ces espaces extra-atmosphériques ou extraterrestres deviennent eux aussi de plus en plus convoités.

En quoi les océans et l’espace représentent-ils de nouveaux enjeux stratégiques majeurs pour le XXIe siècle ?

 

I. Les mers et océans, nouveaux espaces de convoitise

 

Depuis les années 1980-1990, les États ont la possibilité en vertu d’un nouveau droit de la mer de délimiter des frontières de souveraineté dans ces espaces maritimes. Ces espaces maritimes présentent trois caractéristiques majeures :

– Ce sont des espaces de navigation maritime, de circulation et donc d’échanges, ce qui est crucial pour l’approvisionnement des États.

– Ils regorgent de ressources, aussi bien pour la pêche, les ressources halieutiques, que de minerais ou d’énergie, avec du pétrole et du gaz offshore qu’on exploite à des profondeurs de plus en plus grandes.

– Ils sont convoités pour leur puissance géostratégique, sont des vecteurs de projection de puissance par les forces aéronavales. Cela n’est pas une nouveauté. Dans l’Antiquité grecque, Thémistocle met sur pied une flotte de guerre pour Athènes et déclarait que quiconque contrôle la mer contrôle aussi la terre. Depuis toujours, les géopolitologues ont conclu à la supériorité des puissances navales sur les puissances continentales. À la fin du XIXe siècle, l’américain Alfred Mahan avait démontré la prédominance du sea power dans les rapports de force et avait encouragé les États-Unis à mener une politique de construction navale de grande ampleur. C’est ce qu’ont fait plus tard Nicolas Spykman et ses héritiers avec le développement de la politique américaine de neo-containment vis-à-vis de l’URSS puis de la Chine. Il s’agissait pour les États-Unis de projeter leur capacité de projection de force sur les mers et océans.

 

II. L’espace, terrain de jeu des grandes puissances

 

L’Organisation des Nations unies (ONU) a fait rédiger un traité international de l’espace en 1967 qui interdit l’appropriation d’un territoire extraterrestre par l’État ainsi que l’usage des armes en vertu d’une déclaration de 1963 stipulant « Pas d’armes en orbite ». L’espace extra-atmosphérique a d’ailleurs été érigé au rang de patrimoine commun de l’humanité sur le modèle de ce que l’ONU avait fait pour l’Antarctique en 1959. Cela n’a pas permis de mettre fin aux convoitises et rivalités, puisque les États envoient par exemple des satellites à vocation militaire dans l’espace afin de générer de l’information et d’espionner.

Dans ce contexte de militarisation croissante de l’espace, l’ONU reste la seule institution gestionnaire et promeut des usages pacifiques, essentiellement tournés vers l’exploration ; comme en témoigne la mission Apollo 11 de 1969 qui a permis à un premier homme de marcher sur la Lune. De la même façon que les espaces maritimes, seules les grandes puissances ont accès à ces nouvelles frontières.

 

III. Course à l’espace, course à la mer : de nouvelles conflictualités

 

Les États-Unis et l’URSS sont les premières puissances qui, lors de la Guerre froide, ont articulé la course à l’espace à une course aux armements. Entre 1958 et 1962, les deux superpuissances ont réalisé une vingtaine de tests nucléaires dans la haute-atmosphère. Cela est interdit par un traité bilatéral de 1963, élargi plus tard à d’autres pays.

Les États cherchent cependant toujours à contrôler l’espace pour des enjeux d’information et de renseignement, et surtout en termes de prestige. L’espace extra-atmosphérique est donc un espace de rivalités où les grandes puissances se mesurent les unes aux autres et où les puissances émergentes cherchent à se faire une place.

Depuis les années 1990, les États se sont aussi lancés dans une course à la mer puisqu’ils ont le droit de prétendre à une délimitation de leurs espaces de souveraineté maritime selon des critères spécifiques et à géographie variable. Depuis 1990, plus de 200 traités ont été signés entre des États pour accaparer les mers et les océans. Il reste cependant encore 70 à 80 litiges non réglés notamment dans des espaces maritimes très convoités, par exemple les mers de Chine orientale et méridionale ou l’océan glacial Arctique qui s’ouvre aux convoitises des différents pays riverains. Par exemple, en 2007, la Russie a envoyé une expédition le long de la dorsale de Lomonossov, à plus de 4 000 kilomètres de fond, y a planté un drapeau national en prétendant posséder cet espace. Les Russes ont comparé cet exploit à l’alunissage des Américains avec Apollo en 1969.

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