« La religion est l’opium du peuple », Marx

« La religion est l'opium du peuple », Marx

I. Qu’est-ce que la religion ?

Pour comprendre cette citation, il faut partir de la conception marxienne de l’homme. Pour Marx, l’homme n’est jamais un individu abstrait. L’Homme dont on doit parler en philosophie est l’homme concret, c’est-à-dire l’homme qui existe dans tels types de société et d’État et qui est façonné par cette société. Marx parle donc de l’homme comme être social et collectif. À partir de là, pour Marx, la religion est une forme de conscience de soi, c’est-à-dire une représentation que l’homme se donne de lui-même.

Cette conscience de soi qu’est la religion est une conscience de soi inversée. Si cette conscience de soi est inversée, ce n’est pas parce qu’elle induit en erreur naturellement, mais parce que le monde dans lequel vit l’homme est inversé et faussé. On touche directement à la critique marxienne du monde capitaliste bourgeois dont il dénonce le fonctionnement. Ce monde pour Marx est divisé en deux classes :

– la bourgeoisie, propriétaire des moyens de production,

– le prolétariat qui ne possède que sa force de travail qu’il vend à la bourgeoisie.

En raison de cette division de la société en classe, on a une économie, le mode de production capitaliste, décrite et critiquée par Marx.

– Une économie marchande, qui n’est pas capitaliste, fonctionne de la sorte : une marchandise M est échangée contre une certaine somme d’argent A qui permet d’acheter une marchandise M’.

M => A => M’. Ici donc, M = M’.

Par exemple, si j’avais un tee-shirt que je n’aime pas (M), je l’échange contre une certaine somme d’argent (A) avec laquelle j’achète un tee-shirt que j’aime bien (M’). Les deux objets sont donc de même valeur.

– Une économie capitaliste fonctionne différemment. Le modèle commence par une certaine somme d’argent, A, le capital. Avec ce capital A, je vais investir dans une certaine marchandise M. Cette marchandise va me rapporter une certaine somme d’argent A’.

Ici donc, A => M => A’. Mais on fait en sorte que A’ > A.

La différence entre A’ et A est la plus-value, le profit. Toute la question est de savoir quelle est la marchandise qui rapporte plus qu’elle ne coûte. Pour Marx, il s’agit de l’ouvrier. Le patron paie l’ouvrier afin que ce que produit l’ouvrier produise plus que le montant de son salaire. Il s’agit de faire en sorte que l’on ne paie pas l’ouvrier à la juste valeur de ce qu’il a produit. Par exemple, si un ouvrier produit 20 chaussures dans la journée, je vais le payer 10 chaussures et j’empoche ce que Marx appelle le surtravail, c’est-à-dire les 10 autres chaussures. Pour Marx, cette différence se lit dans les termes d’une exploitation et d’une injustice. L’ouvrier est dépossédé d’une partie de son travail, et c’est pour cela que le monde dans lequel il vit est faussé, injuste, inversé. C’est la raison pour laquelle c’est un monde dans lequel l’homme souffre et est misérable.

 

II. Fonction de la religion

La fonction de la religion est alors d’expliquer l’état du monde tel qu’il est et de donner une raison à la misère du monde et à la souffrance de l’homme. Le dogme du péché originel justifie ainsi pourquoi l’homme souffre. On voit bien que la religion justifie cette souffrance en masquant la réalité sociale selon Marx, réalité qui n’est qu’une construction historique. Elle aurait donc pour fonction de légitimer l’état de chose.

La fonction de la religion serait donc d’endormir la population de sorte qu’elle ne soit pas spontanément amenée à trouver la situation injuste. Cependant dit Marx, l’intérêt de la religion est que la religion contient en elle-même le principe de son propre anéantissement. Si la religion exprime la misère de l’homme, elle est aussi une contestation de cette misère par la promesse d’un monde meilleur (le Paradis). La religion, paradoxalement, parce qu’elle contient en elle-même la promesse d’un autre monde, contient en elle-même le principe de sa propre disparition, et constitue une aspiration à la solidarité collective. Pour Marx, il s’agit donc de commencer une critique de la religion pour en arriver à une critique du monde tel qu’il est, tel qu’il existe.

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