Terminale > Philosophie > Notions philosophiques > Stage - L'art
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Après nous être intéressé à l’origine de la création artistique, nous allons nous pencher sur le goût, c’est-à-dire la beauté. Le goût est la capacité de dire « c’est beau ».
Emmanuel Kant donne cette définition du beau : « ce qui plaît universellement sans concept ». Cette expression est expliquée en détail dans une autre vidéo. Le plus important ici est la dimension universelle, aux yeux de Kant, du goût. Kant distingue le beau et l’agréable. L’agréable est ce que je ressens à titre subjectif, et qui est particulier, et donc relatif à ma constitution. Ce que je trouve agréable n’est pas forcément agréable à mon voisin. Le beau est aussi subjectif, au sens où il est fondé sur un plaisir, mais pour Kant, c’est une subjectivité qui prétend à l’universalité. Quand je dis de quelque chose qu’il est beau, je sous-entends que tout le monde devrait éprouver ce même plaisir face à cette chose. Il y a donc selon Kant une universalité du goût.
La thèse du relativisme esthétique remet en cause l’universalité du beau. Voltaire, dans son article « Beau » du Dictionnaire philosophique, fait un constat de faits : les goûts diffèrent. Ce que l’un trouve beau peut être trouvé laid par un autre. Il y a donc une diversité des goûts. Voltaire ajoute que ce qui plaît à un Français ne plaît pas forcément à un Anglais. Ce qui est de mode à Paris ne l’est pas forcément à Pékin.
Une autre remise en cause de l’universalité du beau vient de la critique sociologique de l’art. La sociologie est l’idée que l’on peut comprendre un comportement humain en l’inscrivant dans un contexte social. C’est de la société qu’il faut partir pour comprendre l’homme. En d’autres termes, le comportement humain est l’effet de tout un milieu, et plus précisément pour Pierre Bourdieu, la conséquence d’un milieu social. S’il y a une sociologie de l’art, c’est que notre rapport à l’art n’est pas naturel, ni spontané, mais qu’il est le reflet d’un contexte social. Ce que l’on dit et pense de l’art n’émane pas de notre subjectivité, mais de notre environnement.
Plus précisément, selon Bourdieu, notre propension à goûter et aimer l’art repose sur des conditions souvent oubliées. La première condition est d’appartenir à un milieu fortement doté en capital culturel : on est plus spontanément amené à aimer l’art si, depuis notre petite enfance, nos parents nous emmènent au musée, voir des expositions, au théâtre, au cinéma, etc. Ensuite, il faut être doté d’un certain capital économique : pour aller à l’opéra ou au cinéma régulièrement, il faut des moyens financiers. Enfin, une troisième condition est le lieu de résidence : si on veut une offre culturelle riche et variée, il vaut mieux habiter dans une grande ville. Dans la France rurale, l’offre culturelle est moins large. La propension à aimer l’art ne serait donc ni naturelle, ni universelle mais reposerait sur des conditions sociales et historiques particulières. Ce sont celles de la classe dominante.
Aux yeux de Bourdieu, la classe dominante va ériger ce qu’elle trouve beau en norme du goût en oubliant que son goût reflète sa position sociale particulière. Elle va considérer que son goût est universel alors qu’il est simplement le reflet de ce que lui permettent ses conditions particulières. Cela va être un moyen de se distinguer des autres classes sociales.
Pourtant, certaines œuvres d’art, les « classiques », résistent à cette idée : elles ont traversé les siècles. Il y a donc des œuvres que tout le monde reconnaît, en tout temps et en tout lieu, comme magnifiques et supérieures à d’autres. Cela voudrait donc dire que le beau existerait malgré tout, malgré la diversité des goûts et bien que l’art puisse être utilisé comme outil de distinction sociale.
Pour concilier ce paradoxe, il faut défendre que le goût s’éduque. C’est ce que fait David Hume, philosophe empiriste du XVIIIe siècle. Hume dit que « les principes du goût sont universels ». Il dit la même chose de Kant, avant Kant, mais il ajoute que seuls certains individus sont autorisés à faire de leurs sentiments sur ce qui est beau la norme du goût. Hume les qualifie d’individus compétents. Ce sont des gens qui ont aiguisé leur goût. Il faut des compétences pour dire ce qui est beau ou non, ce n’est pas permis à tout le monde.
Ces compétences sont :
- la délicatesse, c’est-à-dire le fait d’avoir une sensibilité aiguisée,
- la capacité à percevoir des détails, donc de ne pas avoir une sensibilité grossière charmée par ce qui est simple,
- la pratique, c’est-à-dire le fait d’avoir beaucoup fréquenté les œuvres d’art, ce qui permet de faire des comparaisons, pour percevoir l’originalité d’une œuvre,
- l’impartialité, c’est-à-dire la capacité à se détacher de tout préjugé face à une œuvre d’art.
On peut songer ici à ce qui est arrivé aux impressionnistes, très décriés au départ, parce que l’on avait le préjugé que la peinture devait être figurative. Seuls ceux qui possèdent ces qualités, selon Hume, peuvent ériger leurs sentiments en norme du goût.
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